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« Je ne meurs pas, j’entre dans la vie »

Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus : « Je ne meurs pas, j’entre dans la vie »

Comme chaque année, cette année aussi, le 02 novembre pour la grande famille chrétienne catholique est un jour dédié à la mémoire et à la prière pour nos défunts. C’est la grande occasion pour de nombreuses familles de déposer une gerbe de fleur sur la tombe de leur « cher/chère… », de dire une prière et d’inscrire des messes. La grande générosité chrétienne recommande à cette occasion de penser aux âmes du purgatoire – parents ou non – en faisant dire des messes pour elles, sachant qu’elles font partie de la grande Eglise du Christ et ont largement besoin de nos suffrages pour entrer dans la Vie comme dit sainte Thérèse de Lisieux.

Cette réflexion est bâtie sur la vision de la vie et de la mort chez Thérèse de Lisieux, que le Pape Jean-Paul II a déclarée Docteur de l’Eglise le 19 octobre 1997. La vision dont il est question ici est loin d’être une spéculation à caractère philosophique ou théologique, mais le fruit de sa foi, de sa vie quotidienne et de son ardent désir de devenir sainte. Cet enseignement prendra le nom de la « petite voie » ou « voie de l’enfance spirituelle ».

Voici en effet comment le Père Conrad de Meester – auteur de plusieurs livres sur Thérèse de Lisieux – résume les bienfaits de l’enseignement de la sainte, morte à 24 ans : « Les pensées de Thérèse sont devenues un bien commun. Elles ont été intégrées à la spiritualité de notre temps, elles ont contribué à la modeler, au point même que l’on ne sait plus tout ce qu’on lui doit. Plus puissamment peut-être que d’autres, parce qu’elle a tout dit avec simplicité, d’une façon si limpide que tout le monde l’a comprise, Thérèse nous a aidés à nous rapprocher de l’Ecriture ; elle nous a guéris du jansénisme en faisant à nouveau pleinement droit au Dieu d’amour ; elle a approfondi notre conscience d’être d’Eglise et a montré comment tous les hommes avec leurs moyens propres et dans leur cadre habituel pouvaient être de parfaits chrétiens. »

(C. De Meester, Les mains vides. Le message de Thérèse de Lisieux, Ed. Cerf, 1972, p. 10).

Il est presque impossible de comprendre ce que Thérèse pense de la mort et comment elle l’embrasse sans évoquer brièvement les grands piliers de sa vie humaine et spirituelle.

En effet, tous les hommes avec leurs propres moyens, dans les petites choses, les petits faits de leur vie quotidienne, peuvent voir Dieu ; c’est-à-dire devenir des saints. C’est en cela que consiste la grande nouveauté et le grand défi de la « voie de l’enfance spirituelle » proposée par Thérèse.

Ses moyens à elle sont en fait : le Carmel, désert idoine à la rencontre cœur à cœur avec Jésus, dans l’austérité, la prière, le silence, et en compagnie de ses sœurs pour lesquelles elles accomplit avec amour et dévotion de petits actes héroïques dans la vie quotidienne.

Puis l’Amour, que Thérèse choisit d’embrasser dans sa totalité compte tenu de son incapacité d’aimer et la conscience qu’elle a de la volonté de Jésus "d’aimer en elle tous ceux qu’il lui commande d’aimer".

Elle y découvre sa vocation : « O Jésus mon Amour... ma vocation enfin je l'ai trouvée, ma vocation, c'est l'Amour!... Oui j'ai trouvé ma place dans l'Église et cette place, ô mon Dieu, c'est vous qui me l'avez donnée... dans le Cœur de l'Église, ma Mère, je serai l'Amour... ainsi je serai tout... ainsi mon rêve sera réalisé !!!... ».

Le rêve de Thérèse depuis l’enfance c’est de devenir sainte. Elle apprendra à le devenir dans la vie quotidienne, en affrontant la souffrance dans la maladie qui l’emportera vers la « Vie » le 30 septembre 1897. L’abandon à Dieu dans l’espérance est un autre pilier de la spiritualité thérésienne, fondé quant à lui sur la confiance totale en Jésus.

Il est en effet impossible pour le chrétien d’aujourd’hui de penser à la mort non comme la fin de tout, mais comme l’ouverture vers la « Vie » s’il ne s’abandonne pas totalement dans les mains du Seigneur comme un petit enfant. Thérèse l’a accompli en sortant d’elle-même pour s’abandonner à Jésus. La « petite voie » ici devient en effet la voie de l’abandon en Jésus. Thérèse, comme Job, le traduit d’ailleurs en ces termes en pensant au soir de sa vie : « Au soir de cette vie, je paraîtrai devant vous les mains vides ». Elle dit encore : « Lorsque je paraîtrai devant mon Epoux Bien-Aimé, je n’aurai que mes désirs à lui présenter ».

Je ne saurais clore cette réflexion sans évoquer l’Amour miséricordieux de notre Dieu qui accroît en Thérèse la conscience de sa petitesse et de sa pauvreté qu’il convient d’accepter : « De son côté, l’homme doit accepter à fond sa pauvreté, ce qui implique une profonde humilité. Pour appartenir au nombre des invités, il doit se reconnaître comme "un tout petit" » (C. De Meester, œuvre citée, p. 82). Le secret de Thérèse, c’est qu’elle a fait la découverte de la miséricorde de Dieu « comme centre à partir duquel l’homme qui se confie en elle devient saint » (C. De Meester, Ibid., p. 84). Elle le communique au chrétien d’aujourd’hui pour l’aider à modifier l’idée de la mort physique comme fin de tout et à y voir l’ouverture à la rencontre avec Dieu, Père Miséricordieux dont l’immense Amour pour tout homme n’attend qu’un simple repentir de ses fautes.

Tout dans la vie de Thérèse est devenu « langage d’amour » : sa naissance, sa vie, ses souffrances et sa mort. Apprenons nous aussi à faire de notre vie, de nos petites morts quotidiennes et de notre entrée prochaine dans la « Vie » un langage d’amour pour nos frères et sœurs les hommes.

  1. Charles Olivier Owono Mbarga