Carême 2021 - Jour 18 : La prière, fête de l’Esprit-Saint

 

Ecclésiaste 3,7 : « Il y a un temps pour déchirer, et un temps pour coudre ; un temps pour se taire, et un temps pour parler. »

« Prier, ce n'est pas mendier, mais rendre notre vie plus intense. » Giovanni Vannucci

 

Léon Tolstoï, Les trois ermites : Pendant la traversée d'Arkhangelsk vers le monastère forteresse de Solovki, l'archiprêtre demanda au commandant du navire de s'arrêter un moment sur une île où se trouvaient trois ermites qui jouissaient d'une réputation de sainteté. Quand les trois le virent, ils s'inclinèrent devant le prêtre et répondirent donc à sa question sur la manière dont ils priaient : « Nous prions en disant : Vous êtes trois, nous sommes trois, ayez pitié de nous ! »

L'archiprêtre dit alors : « Vous avez sans doute entendu parler de la Sainte Trinité, mais vous ne priez pas comme il faut. Je vous enseignerai d'après l'Écriture Sainte et vous dirai comment Dieu a commandé aux hommes de Le prier »... et il commença à leur enseigner le Notre Père. Il répétait dix fois et cent fois, jusqu'à ce que les ermites l'eussent appris.

L'archiprêtre revint donc satisfait au navire qui l'attendait. Mais pendant la nuit, il était assis à l'arrière et regardait la mer d'où l'île avait disparu. Soudain, il vit que les ermites couraient sur la mer derrière le bateau sur lequel il se trouvait. Le rejoignant, ils lui dirent : « Nous avons oublié, ô serviteur de Dieu, ta prière ! » L'archiprêtre se signa et s'inclina devant les trois ermites qui, grâce à leur grande foi, avaient marché sur l'eau. Et il dit : « Votre prière, ô ermites de Dieu, est également chère au Seigneur. Il ne me revient pas de vous instruire. Priez pour nous, pécheurs ! » Et l’archiprêtre s'inclina de nouveau jusqu'au sol devant les ermites qui, se retournant, repartirent sur la mer.

  


 Saint Augustin, Lettre à Proba :  « Bannissons donc de l'oraison les nombreuses paroles, mais prions beaucoup de cœur, si notre ferveur ne se ralentit pas. Parler beaucoup, c'est faire en priant une chose nécessaire par des paroles superflues. Prier beaucoup, c'est frapper longtemps avec un pieux mouvement du cœur à la porte de celui que nous prions. La prière en effet consiste plus dans des gémissements et des larmes, que dans des discours et des paroles. Dieu met nos larmes en sa présence, et nos gémissements ne sont pas ignorés de celui qui a tout créé par sa parole et n'a pas besoin de paroles humaines. »


Sentences des Pères du désert : « Les frères demandèrent à Abba Agathon : “Quelle est, parmi les bonnes œuvres, la vertu qui comporte le plus d'effort ?”  Il leur dit : “Pardonnez-moi, je crois qu'il n'y a pas d'effort comparable à celui de prier Dieu. En effet. chaque fois que l'homme veut prier, les ennemis veulent l'en empêcher. Car, ils savent que rien ne les entrave comme la prière. Pour toute autre œuvre bonne qu'un homme entreprend, s'il y persévère il acquiert de la quiétude. En revanche, il doit lutter jusqu'au dernier souffle pour prier”».


 Frère Emiliano* :  Prier, ce n'est pas dire des prières, mais être en Présence de Celui qui t'aime et ne t'abandonne jamais. « Nous apprenons à prier en priant, de même que nous apprenons à marcher en marchant », disait Thérèse d'Avila. Il n'y a pas de méthode, de technique, de position particulière du corps qui puisse satisfaire ce besoin profond et ce désir qui sont en l'homme depuis les origines de son existence sur terre. L'homme est un « fragment de Lumière » assoiffé et affamé du Dieu qui le cherche depuis l'éternité.

La prière chrétienne n'est pas une évasion de la réalité, mais une adhésion au réel, une obéissance à Dieu, un abandon confiant à la vie, aux situations joyeuses et douloureuses de chaque jour. « Prier, c'est penser à Dieu en l'aimant » (Charles de Foucauld), mais aussi regarder les étoiles, remercier, louer, bénir le donateur de la Vie pour tous ses bienfaits. La prière est la découverte de notre propre « précarité » (en latin prier = precari) et de notre dépendance vis-à-vis de I'Absolu. Prier, c'est demander, implorer, supplier, invoquer Dieu. La prière est la transformation continue du cœur de pierre en un cœur de chair (cf. Ez 1 1, 19), la purification du regard et la libération intérieure des idoles pour adorer le Seigneur « en esprit et en vérité » (Jn4,24).

Prier, c'est oindre la tête avec l'huile de l'Esprit Saint et panser les plaies du cœur pour lutter contre les « lions » des mauvaises pensées qui se trouvent dans l'arène intérieure. Prier c'est marcher, non pas seul, mais en accueillant le voyageur Jésus en notre compagnie, et en laissant se joindre à la conversation celui qui, sur le chemin d'Emmaüs, nous montre l'horizon de notre vie (cf. Le 24, 13-33). La prière est l'expérience mystique de l'Autre et de l'Ailleurs.

La prière est la clé de l'éveil : elle nous fait renaître à une vie nouvelle et commencer chaque matin comme le premier jour d'école. Prier, c'est ouvrir le « troisième » œil (le premier : les sens ; le second : la raison ; le troisième : la mystique) pour regarder les autres et le monde avec étonnement et émer­veillement comme des enfants, des fous, des saints, des poètes et des artistes. Prie beaucoup, aime beaucoup et pense de manière simple, intelligente et profonde.

Et Carlo Carretto déclare : « La prière est le résumé de notre relation avec Dieu. Nous pouvons dire que nous sommes ce que nous prions. Le degré de notre foi est le degré de notre prière ; la force de notre espérance est la force de notre prière ; la chaleur de notre charité est la chaleur de notre prière. Ni plus ni moins. »

La prière n'est pas une baguette magique ni un bonbon pour l'âme, mais elle nous ouvre les portes pour accomplir la volonté de Dieu. Nous sommes parfois timides dans les requêtes que nous adressons au Seigneur ; nous posons peut-être trop de questions aux prêtres, aux parents, aux éducateurs, aux psychologues et ne demandons pas directement à l'intéressé. Je ne crois pas aux chrétiens qui s'adonnent à beaucoup d'actions caritatives sans prier, et je ne crois pas aux chrétiens qui prient seulement, sans charité. La prière est une bénédiction puissante pour les familles, les prêtres, les couples en crise, les enfants, les malades du corps et de l'esprit. 

Saint Alphonse de Liguori résume tout cela (cliquer pour déployer)

La prière ne te donnera pas le don de t'immuniser contre la douleur, mais elle te donnera certainement la vertu d'une endurance ferme et patiente.
La capacité de l'âme avec la foi en récompense.
Elle montre la valeur de la douleur acceptée au nom de Dieu. Elle écarte toute colère de la justice divine.
Elle est bienfaisante envers les ennemis.
Elle supplie pour les persécuteurs.
Elle soutient les faibles.
Elle soigne les malades.
Elle ouvre les portes de la prison. Elle défait les chaînes de l'innocent. Elle lave les péchés.
Elle refoule les tentations. Elle éteint la persécution. Elle réconforte les craintifs. Elle encourage le généreux. Elle guide les pèlerins.
Elle apaise les tempêtes. Elle retient les malfaiteurs. Elle soutient les pauvres.
Elle touche les cœurs des riches. Elle relève ceux qui sont tombés. Elle soutient les faibles.
Elle raffermit les forts.
Seule la prière désarme Dieu.

  


 

1. Cal Robert Sarah* - La force du silence (cliquer pour déployer)

53 - Mère Teresa avait une connaissance intime du silence. Elle avait connu la dure expérience du silence de Dieu, comme sainte Thérèse d'Avila, saint Jean de la Croix et sainte Thérèse de Lisieux. Elle était une femme de silence parce qu'elle était une femme de prière, constamment avec Dieu. Elle voulait demeurer dans le silence de Dieu. La religieuse n'aimait pas par­ler et fuyait les orages du bruit mondain. Mère Teresa jouissait d'une estime incroyable dans le monde entier et elle gardait l'esprit de l'enfance. Elle imitait le Christ dans son silence, son humilité, sa pauvreté, sa douceur et sa charité. Elle aimait demeurer en silence des heures entières devant Jésus présent dans l'Eucharistie. Pour elle, prier, c'était aimer de cout son cœur, de toute son âme et de coures ses forces ; c'était donner cout son être et cout son temps au Seigneur. La plus belle offrande qu'elle voulait faire d'elle-même, et de coutes ses activités auprès des pauvres, c'était de consacrer de longs moments de sa journée pour un cœur à cœur avec Dieu, afin que ces instants d'intimité permettent à son cœur de se gonfler d'un amour sans réserve. Comme Jésus, son cœur avait toujours soif d'Amour. Le cri de Jésus « J'ai soif » est inscrit dans toutes les chapelles des Sœurs Missionnaires de la Charité.

 

23 - Que deviendra notre monde s'il ne recherche pas des espaces de silence ? Le repos intérieur et l'harmonie ne peuvent découler que du silence. Sans lui, la vie n'existe pas. Les plus grands mystères du monde naissent et se déploient dans le silence. Comment la nature se développe-t-elle ? Dans le plus grand silence. Un arbre pousse dans le silence, et les sources d'eau coulent d'abord dans le silence de la terre. Le soleil qui se lève sur la terre nous réchauffe, étincelant et grandiose, dans le silence. L'extraordinaire est toujours silencieux.
Dans le ventre de sa mère, l'enfant grandit en silence. Quand un nourrisson dore dans son berceau, ses parents aiment à le couver du regard en silence, pour ne pas le réveiller ; ce spectacle ne peut se contempler qu'en silence, dans l'émerveillement du mystère de l'homme en sa pureté originelle.

 

 

 

  • Résolution : Je vais prier toute la journée la prière du cœur : « Seigneur Jésus, Fils du Dieu vivant, aie pitié de moi, pécheur ». Que ce soit le temps de la rencontre, de l'intimité en ta Présence.

 


 

 


Prière à notre-Dame du silence

O Marie silencieuse, Toi qui as tout imaginé sans parler, au-delà de toute vision humaine, aide-moi à entrer dans le mystère du Christ doucement et en profondeur, comme un pèlerin brûlant de soif qui entre dans une grotte sombre au fond de laquelle il entend couler de l'eau paisiblement. Fais que, tout d'abord, je m'agenouille pour adorer. Et qu'ensuite, je touche le rocher avec confiance, pour entrer en toute sérénité dans le mystère. Enfin, fais que j’apaise ma soif dans l'eau de la Parole en silence comme Toi. Alors, ô Marie, le secret de ton Fils Crucifié me sera peut-être révélé dans son immensité infinie, et les images et les mots tomberont pour laisser la place uniquement à l'Infini. Amen


 

*Sources utilisées pour le carême 2021

 

La force du silence, contre la dictature du bruit
du cardinal Robert Sarah, éditions Fayard

 

Le chemin du silence, manuel pour ceux qui cherchent le bonheur
de frère Emiliano Antenucci, recteur du sanctuaire de Notre-Dame du silence en Italie. Editions du Carmel

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