Les songes de Joseph, là où Dieu se révèle

Nous évoquons les sept douleurs de la Vierge Marie, mais nous pourrions évoquer les douleurs de Joseph.
Nous allons découvrir quatre crises vécues par Joseph qui peuvent nous enseigner comment mieux traverser nos propres crises où les crises du monde que nous subissons et qui finalement peuvent ressembler à celles de Joseph.

La première crise de Joseph c’est quand il réalise que Marie est enceinte. Remarquez que le songe arrive après la crise. Quand Joseph dort, Dieu se manifeste à lui. Le premier enseignement qu’on peut retirer pour nous : Dieu se révèle à Joseph non pas quand Joseph travaille ou dans sa relation avec la Vierge Marie, ce n’est pas dans les grandes chose ou les belles choses de sa vie qu'Il se manifeste.

Dieu choisit de se révéler à lui et de lui dire sa mission, le projet qu’il a pour lui lorsque Joseph dort, lorsqu'il n’est pas fort, quand il n’est pas en pleine possession de ses moyens, lorsque Joseph est dépendant, abandonné, lorsqu’il lâche complètement prise, qu’il se désapproprie. C’est un bon enseignement pour nous qui voulons connaître la volonté de Dieu en bon chrétien. On veut savoir quel est le plan de Dieu pour nous. On va faire la retraite de saint Ignace des trente jours pour discerner et voir. On va faire un grand pèlerinage… Oui ! Mais si c’est pour faire en sorte que le Seigneur se révèle à moi, dans un sens de désappropriation, comme saint Joseph, c’est bon. Mais si c’est pour faire, être grand, ce n’est pas compatible avec le songe de Joseph.
Ce n’est pas forcément quand on est au sommet de nos capacités, quand nous sommes grands que Dieu se révèle à nous.

Matthieu 1, 18-24 : « Or, voici comment fut engendré Jésus Christ : Marie, sa mère, avait été accordée en mariage à Joseph ; avant qu’ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l’action de l’Esprit Saint. Joseph, son époux, qui était un homme juste, et ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la renvoyer en secret.
Comme il avait formé ce projet, voici que l’ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus (c’est-à-dire : Le-Seigneur-sauve), car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. »
Tout cela est arrivé pour que soit accomplie la parole du Seigneur prononcée par le prophète : Voici que la Vierge concevra, et elle enfantera un fils ; on lui donnera le nom d’Emmanuel, qui se traduit : « Dieu-avec-nous »
Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse. »

Nous avons ici dans le songe, la mission que Dieu donne à Joseph à travers l’ange : sa femme va enfanter d’un fils et tu lui donneras le nom de Jésus. La mission de Joseph est de donner le nom de Jésus à cet enfant.

Un détail est intéressant : Joseph est appelé « juste ». La justice on peut la voir de deux façons. Dans l’Ancien Testament, juste signifie saint, c’est vivre conformément à la loi. C’est ce qui nous est dit de Zacharie et d’Elisabeth qui sont justes parce qu’ils suivent la loi. La loi était le moyen d’être en accord avec Dieu, d’être ajusté à Dieu.
Joseph est reconnu juste en cela qu’il est complètement ajusté à Dieu. Cet ajustement lui permet, durant les crises qu’il traverse d’avoir le comportement juste.
On voit bien ce lien entre notre relation à Dieu et l’exercice de notre liberté sur terre. On sait qu’il faut être réconcilié avec Dieu, grâce à la confession et être réconcilié avec les autres. Il faut recevoir avant de donner. Il y a cette primauté de cette relation à Dieu, de cet ajustement qui permet d’avoir le comportement juste dans les épreuves, les crises, les peines, dans ces moments où on est un peu bousculé pour arriver à retrouver l’équilibre pour ne pas être complètement déstabilisé.

Le pape François a écrit plusieurs fois sur saint Joseph, il a dit qu’il arrivait de grandes choses à saint Joseph quand il dormait. Il faut donc ne pas avoir peur de s’abandonner au Seigneur, de bien dormir. Le pape François a dit qu’il avait sur son bureau une statue de saint Joseph qui dort. Il écrit des petits billets concernant les difficultés de sa vie, lorsqu’il traverse des crises, quand il a des intentions de prières qu’il place sous saint Joseph en lui abandonnant tout cela. 

Quand on parle de Marie qui est enceinte, on imagine le choc que cela a dû être pour Joseph : humainement saint Joseph a pu vivre cette situation comme une trahison, une injustice, il a vécu un conflit intérieur pour savoir ce qu’il allait faire, il a pu remettre en cause des plans qu’il avait établis : ils étaient mariés selon la loi, c’était la période des fiançailles. Leur avenir est compromis. Saint Joseph a pu avoir aussi une colère envers la Vierge Marie. C’est après que l’ange arrive. L’ange aurait très bien pu arriver avant en expliquant à Joseph de ne pas avoir peur. En fait c’est la volonté de Dieu que l’ange arrive après.
Pour nous c’est une très bonne chose, car cela nourrit notre espérance quand on vit des crises, des moments d’épreuves, en se disant que l’ange peut encore venir, que Dieu peut encore nous révéler le sens de ce qui se passe parce que c’est ce qui s’est passé avec saint Joseph.

Une autre peine de saint Joseph est l’édit de César Auguste qui annonce le recensement.
La réaction de Joseph est de se soumettre au pouvoir politique parce qu’il va aller à Bethléem. Il aurait très bien pu dire qu’il ne voulait pas y aller, parce que c’était sa volonté, en plus avec sa femme proche du terme, il avait un argument. Non ! Joseph obéit à cet édit. Dans l’obéissance il peut y avoir un fruit.
A cause de cet édit il va arrêter son travail pendant longtemps, car après Bethléem, il y a aura le départ pour l’Egypte. C’est une vrai coupure. La première conséquence c’est qu’il va arrêter de gagner de l’argent, il n'a plus de revenu. En cela, la situation de saint Joseph rejoint les personnes au chômage.
Saint Joseph va devoir puiser dans ses réserves pour subvenir aux besoins de la Vierge Marie et de l’enfant. Les économies qu’avait saint Joseph étaient pour réaliser son projet de fonder une famille. C’est profondément injuste d’assurer la survie de la sainte Famille en puisant dans les économies. Tout cela pour rien. Ce recensement ne va rien apporter à saint Joseph. C’est très injuste et pourtant saint Joseph y va. Alors même qu’il ne voit pas le sens de tout cela. Ce n’est qu’à postériori qu’il comprendra le sens : il va réaliser les prophéties selon lesquelles le Messie allait naître à Bethléem. Au premier degré, cette prophétie se réalise à travers des situations complètement absurdes.
Cela nous montre que Dieu réalise des choses plus grandes que nous ne pouvons les voir. Même si nous voyons les réalisations de Dieu, son œuvre est encore plus grande. Pour tous ces moments où on ne voit pas le sens, on peut choisir cette obéissance, car cela a du sens pour Dieu. Dieu peut faire de très grandes choses à travers cette apparente absence de sens.

Une autre peine de saint Joseph est le trajet pour aller à Bethléem
C’est une souffrance physique, car durant ce trajet, il accompagne la Vierge Marie, au terme de sa grossesse. On imagine l’inconfort de la Vierge Marie, la souffrance physique. Saint Joseph souffre de compassion pour son épouse. La souffrance de la Vierge Marie devient la souffrance de saint Joseph par amour. Il ne peut rien faire de plus pour Marie, il est impuissant, démuni. C’est une peine pour saint Joseph.
Ce qui porte du fruit, c'est sa fidélité, sa patience, sa persévérance, sa présence.

Une autre peine pour saint Joseph est celle du rejet quand ils arrivent à Bethléem.
Ils avaient des attentes légitimes d’être accueillis, d’avoir un lieu qui soit confortable, digne pour Marie, un lieu où ils puissent être soutenus. Cette attente se poursuit pas un échec. Joseph a connu plein d’échecs. Avec ce refus s’ajoutent la fatigue psychologique, la fatigue physique du voyage. La solution que Joseph trouve est misérable, c’est une étable, c’est un lieu qui n’est pas du tout à la hauteur. C’est humiliant, triste.
Mais c’est là que vient la grande joie de saint Joseph. Dans cette étable va naître l’enfant Jésus. Saint Joseph a été le premier homme à recevoir dans ses bras le Fils de Dieu fait Homme. C’est assez extraordinaire. Il a pu voir et toucher Dieu. Ce fut une grande joie pour saint Joseph, la joie qu’il a accompli la mission qui lui était confiée, qui était de donner un nom à cet enfant. Saint Joseph a été digne de confiance. Il a vécu plein de crises, d’échecs, de peines, de difficultés et pourtant Dieu lui a confié une mission qu’il a mené à terme : il a donné ce nom à cet enfant.

C’est notre joie quand on réalise qu’on a fait la volonté de Dieu.

Dieu pourrait faire les choses sans nous et pourtant il veut passer à travers nous. Le mystère de saint Joseph est que Dieu veut que son Fils ait un père humain adoptif qui soit l’image de Dieu le Père. Jésus a découvert la tendresse de son Père céleste en voyant la tendresse de son père terrestre.

Don Pierre, sanctuaire de Montligeon
Enseignement partagé la veille de la fête de saint Joseph, époux de la Vierge Marie, lors de la retraite 2022 des guides accompagnateurs de pèlerinages

Image : Statue de saint Joseph et les ex-votos dans le sanctuaire de Montligeon